La boîte aux lettres est là, impassible, attendant d'engloutir, dans ce bruit de clapet soulevé que connaissent bien les rares pékins à encore écrire à l'encre, sur du papier-velin, de longues missives en partance pour la Corrèze, ou peut-être bien le Zambèze.

Ce soir-là, en prenant la photo, fixant sur l'objectif l'église Saint-Louis-des-Invalides où repose Napoléon 1er, l'envie furieuse et folle me vint un instant d'y poster une lettre à l'Empereur, sur laquelle j'eus simplement écrit, au-dessus de ma signature : "Revenez, Sire" ...
Nous étions le 15 août, jour-anniversaire de sa naissance, la France ne bruissait que de voix assourdies par le port du masque; les chaînes d'info ne s'intéressaient qu'au possible reconfinement général, et François Bayrou négociait les conditions de sa nomination comme haut-commissaire au plan, dans un dîner en ville.
Et moi, sur le trottoir, fixant le dôme, je me mis soudain  à revoir des images d'enfance, des images d'Épinal, où l'on voyait l'Empereur à la veille d'Austerlitz, bicorne sur la tête, haranguant la Garde Impériale. Il paraît qu'aujourd'hui, ces pensées sont un délit, un délire inavouable. La grandeur n'est plus de mode. 
On déboulonne les statues, et bientôt, ce sera le tour des boîtes aux lettres...

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